B-Sides
Avec B-Sides, NAFT signe un disque qui n’a rien d’une collection de chutes de studio : c’est un véritable manifeste sonore, une plongée dans les coulisses créatives du trio belge, où chaque piste explore une facette plus brute, plus dépouillée, parfois plus aventureuse que sur leurs sorties principales. L’album fonctionne comme un laboratoire ouvert : on y entend le groupe tester des idées, étirer des textures, jouer avec les limites de leur électro-jazz incandescent.
Dès les premières secondes, NAFT installe ce mélange unique de tension électronique et de souffle instrumental. Les synthés granuleux et les beats secs dessinent un territoire urbain, presque nocturne, sur lequel le saxophone vient allumer des éclats de lumière. Ici, le son n’est pas poli : il respire, se frotte, se salit. C’est précisément ce qui fait la force de B-Sides. Les morceaux semblent surgir de la répétition, du moment où une boucle improvisée prend vie et commence à se transformer. On sent la scène derrière chaque décision sonore : le groove se construit comme un organisme vivant, le rythme se densifie, les lignes mélodiques s’émancipent.
L’album frappe par son économie de moyens. Pas de surproduction, pas de couches inutiles. NAFT revient à l’essence : un motif, une pulsation, un espace. Cette sobriété révèle la cohésion du trio. La batterie de Simon Delecluse impose une architecture précise mais jamais rigide ; les claviers de Louis Favre sculptent des climats à la fois rêches et enveloppants ; le saxophone de Victor Merchier agit comme une boussole émotionnelle, modulée, triturée, filtrée, mais toujours chargée d’une chaleur humaine qui contraste avec les textures électroniques.
Certaines pistes prennent des allures de mini-rituels hypnotiques. D’autres flirtent avec la techno minimale ou avec un jazz presque spectral. Le tout reste parfaitement fluide : B-Sides n’est pas un assemblage hétérogène, mais une traversée, un récit. La cohérence tient dans ce sens de la pulsation continue — un cœur qui bat sous la structure — et dans la manière dont NAFT réussit à rester à la frontière du club et de l’improvisation, sans jamais basculer complètement dans l’un ou l’autre.
Ce disque met également en lumière quelque chose que leurs productions plus « officielles » suggéraient déjà : NAFT possède une maturité rythmique rare. Le trio sait installer la tension, la relâcher, repartir ailleurs. Rien n’est gratuit, et pourtant tout semble spontané. B-Sides est une invitation à voir et entendre le groupe autrement, plus nu, plus direct, plus audacieux. En révélant leur face cachée, NAFT offre paradoxalement leur portrait le plus sincère. B-Sides n’est pas un complément : c’est une pièce maîtresse, le témoignage d’une musique en mouvement permanent, vibrante et intensément vivante.
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