Piano Circle Songs
Avec Piano Circle Songs, Francesco Tristano signe sans doute son disque le plus intimiste. Loin des collaborations électroniques ou des grandes explorations hybrides qui ont fait sa réputation, il choisit ici la sobriété d’un piano solo, parfois rejoint par le toucher délicat de Ryuichi Sakamoto. Le titre annonce déjà le projet : des « cercles », petites formes répétitives, presque minimalistes, qui se déploient comme des mandalas sonores. Ce sont moins des pièces de virtuosité que des méditations, construites autour de cellules mélodiques simples et lumineuses, qu’il fait tourner, évoluer, respirer.
On sent l’influence de Bach dans la clarté des lignes et dans l’art du motif qui se répète en se transformant subtilement. Mais il y a aussi l’héritage du minimalisme américain – Glass, Riley – dont Tristano reprend l’idée d’une musique hypnotique, proche de la transe, tout en gardant un lyrisme européen. Le résultat n’est jamais froid : au contraire, il y a une douceur presque fragile, un refus de la démonstration. Certaines pièces sont à peine esquissées, comme si elles s’ouvraient sur un silence intérieur. D’autres s’épaississent progressivement, dessinant des architectures discrètes mais solides.
La présence de Ryuichi Sakamoto, qui interprète quatre titres, apporte une couleur particulière. Son jeu plus dépouillé, plus contemplatif, contraste avec l’élan de Tristano et souligne le caractère méditatif du disque. Entre eux se crée un dialogue implicite, une fraternité de musiciens qui partagent le goût de la simplicité et de l’épure. On est loin du Tristano des clubs techno ou des relectures électro de Jeff Mills : ici, c’est un pianiste-poète qui se livre, presque en confidence.
Piano Circle Songs est un album qui ne cherche pas à séduire par l’éclat mais par la répétition apaisée, par la clarté d’un motif qui s’installe et nous enveloppe. C’est un disque à écouter dans la durée, en laissant le temps faire son œuvre. Francesco Tristano y confirme sa capacité rare à passer d’un monde à l’autre – du baroque à la techno, de l’électronique à la méditation acoustique – sans jamais perdre ce qui fait son identité : une sincérité de geste, une curiosité sans frontières et une sensibilité qui donne à son piano une voix singulière.
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