Bojan Z

Né à Belgrade en 1968, Bojan Zulfikarpašić – plus connu sous le nom de Bojan Z – a grandi dans une famille où la musique occupait une place centrale. Formé très tôt au piano, il se fait remarquer dès l’adolescence sur la scène jazz yougoslave, avant de remporter en 1989 le prix du meilleur jeune musicien de jazz de son pays. Après un détour par les États-Unis, où il travaille avec Clare Fischer, il choisit Paris comme terre d’accueil. Depuis la fin des années 1980, il est devenu l’une des figures incontournables du jazz européen.

Ce qui frappe d’emblée chez Bojan Z, c’est sa manière d’entrelacer les influences. Le jazz, dans ses multiples déclinaisons, reste son socle, mais il y insuffle des couleurs balkaniques, des éclats de musique classique et une énergie électrique héritée du funk et du rock. Au fil des ans, il a collaboré avec des musiciens tels qu’Henri Texier, Michel Portal ou encore Julien Lourau, tout en menant un parcours personnel d’une grande cohérence.

Parmi ses enregistrements marquants, on peut citer Solobsession (2000), premier album solo qui révèle un pianiste à la fois poétique et intrépide, Transpacifik (2003), dialogue transatlantique en trio, ou encore Xenophonia (2006), où il introduit son fameux « xénophone », un Fender Rhodes bricolé, enrichi d’effets et de pédales. Avec cet instrument hybride, il brouille les pistes : parfois guitare électrique, parfois oud imaginaire, parfois percussion, il ouvre un champ sonore inédit. Ses albums suivants, comme Soul Shelter (2012) ou Housewarming (2016, en duo avec Nils Wogram), confirment un goût pour l’exploration sans renoncer à la mélodie. Plus récemment, As Is (2023) l’a vu revenir à une forme plus dépouillée, centrée sur le piano solo, avec une profondeur méditative.

Les distinctions ne manquent pas : prix Django-Reinhardt, Victoires du Jazz, Grand prix SACEM… Mais au-delà des récompenses, Bojan Z est surtout reconnu pour sa singularité. Ses improvisations ne cherchent pas l’effet spectaculaire : elles avancent comme des récits, parfois tendres, parfois orageux, toujours traversés par un sens du rythme organique et une imagination sonore nourrie de contrastes.

À travers plus de trente ans de carrière, Bojan Z s’est imposé comme un musicien des passages : entre Orient et Occident, entre tradition et modernité, entre piano acoustique et expérimentations électroniques. Son jeu, à la fois raffiné et audacieux, fait de lui l’un des pianistes les plus inventifs de la scène européenne. Chez lui, chaque note semble franchir une frontière invisible, et inviter l’auditeur à voyager au-delà des styles établis.

 

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